b. La Cathédrale meurtrie
La Grande Blessée…
La Cathédrale a été endommagée par l’incendie
mais n’est pas détruite. Elle devient ainsi le symbole de la France
meurtrie mais toujours combattante. L’œuvre de Kalas contient la légende
suivante : " Lapides clamabunt !!! " (les pierres crieront). L’abbé
Aubert (qui a publié son ouvrage sous le pseudonyme significatif
de Vindex, c’est à dire vengeance) a utilisé le même
terme pour intituler son septième chapitre.242
Ou encore Louis Bréhier s’exclame au début de son ouvrage
:
" Pendant plus d’un an, ils se sont acharnés sur la vieille
basilique à coups d’obus et de bombes incendiaires, sans que leur
rage pût venir à bout de la solidité de roc des voûtes
du XIIIe siècle. Ils ont pu l’insulter et la mutiler, incendier
son grand comble, enfoncer les vitraux, déchiqueter et calciner
les statues, mais sa grande ombre de dresse toujours comme une protestation
muette, au-dessus de la ville désolée. "243
Chaque blessure alors infligée à l’édifice va avoir
une justification aux yeux de l’opinion française :
" Le jour anniversaire du Kaiser l’assaut était plus sauvage
et chaque revers allemand infligeait un châtiment immédiat
et déréglé. "244
…et la Miraculée
Comme nous l’avons déjà vu dans le chapitre consacré
à l’occupation de Reims, la statue équestre de Jeanne d’Arc
est perçue comme une personnification de la France envahie. Au fil
de la guerre, elle deviendra l’incarnation de la France combattante car
contrairement " à sa sœur ", elle ne sera que partiellement abîmée.
" De tout ce qui entourait la cathédrale, dans le vaste périmètre
de son bombardement particulier, un seul monument est resté debout,
sain et sauf : la statue de Jeanne d’Arc, érigée sur la place
du Parvis !
Dressée fièrement sur son cheval de bataille, toujours
haute et ferme, son épée. Nous devons voir dans ce miracle
superbe, un céleste présage, un ordre divin d’espérance
et de foi. "245
Une composition d’Isabelle Charlier intitulée "la Cathédrale
Martyre auréolant Jehanne la Sainte"246
associe ces deux symboles. On voit ainsi la statue équestre de Jeanne
d’Arc, installée en face du Grand Portail, et encerclée par
les flammes. Un petit drapeau tricolore a été suspendu à
son épée.247
242 VINDEX, La
Basilique dévastée, p 61 à 63.
243 BREHIER (L.),
La
Cathédrale de Reims : une œuvre française, p 2.
244 CRAM (R. A.),
La
Cathédrale de Reims, hier - aujourd’hui - demain, p 16.
245 VACHON (M.),
Les
Villes martyres de France et de Belgique, p 79.
246 I.F.
n°187.
247 Un petit drapeau
tricolore a en effet été placé sur l’épée
de la statue et y restera jusqu’à ce que la statue soit déboulonnée
pour être mise en lieu sur (avril 1917).