Bilan des bombardements
(Compte-rendu d'Henri Deneux)


Parmi les principaux dégâts nous avons à déplorer la perte artistique de la statuaire du portail au droit de la tour nord, pour laquelle, heureusement, les documents ne manquent pas.

Il n'en est pas de même pour les revers de ce portail, dont la statuaire sous les tours nord et sud avait été cachée par des tambours du XVIIIe siècle provenant de Saint-Nicaise.

Le feu a léché toutes ces figures qui ne sont plus aujourd’hui que des blocs informes.
Heureusement, la statuaire du revers, au droit de la porte centrale, a été épargnée.
 
Le pilier sud-est de la croisée du transept, touché par un obus de gros calibre, fut consolidé provisoirement par les soldats du génie. C'est grâce à ce travail que l'on put éviter l'effondrement de la partie supérieure.

La masse de cette pile a été complètement disloquée ; elle devra être refaite entièrement depuis le sol du triforium jusqu'au niveau de la naissance des voûtes.

Celles-ci avaient heureusement une épaisseur anormale : 0,55, tandis que celles de Paris n'ont que 0,12 et celles d'Amiens 0,17.

C'est grâce à cette exagération dans les dimensions des matériaux employés que l'édifice a tenu aussi merveilleusement sous les coups répétés de l'ennemi, c'est aussi grâce aux nombreux chaînages en fer scellés au plomb qui relient ensemble les différentes parties de l'édifice que nous n'avons pas eu à déplorer de plus graves désordres dans l'ossature.

Parmi les dégâts extérieurs de nombreuses statues ont été mutilées et culbutées par terre, comme par exemple la figure de l'Église placée vis-à-vis de la Synagogue.

Le roi, voisin de cette dernière figure, Louis le Gros, est tombé de 30 mètres de hauteur sur le toit de la sacristie, entraînant avec lui la colonne placée à sa gauche. Le chapiteau était resté suspendu par les chaînages en cuivre qui le reliaient au monument.

Au chapitre des pertes, il faut également déplorer celle du clocher à l'ange supporté par huit cariatides de bois recouvertes de plomb, qui servait d'amortissement à l'extrémité du grand comble.
Ce clocher, ainsi que toute la charpente qui couvrait les parties hautes, avait été refait après l'incendie de 1481.

Il était décoré de pinacles, fleurons et arcs-boutants, le tout avait été doré et des traces, très visibles, de cette dorure subsistaient encore avant guerre.

Le don Rockfeller prévoit dans son programme le rétablissement de ce petit clocher.

Enfin la charpente, représentant 2.430 stères de bois, a été entièrement détruite : il n'est pas resté le moindre morceau de bois calciné.

Toute la plomberie fondue dans l'incendie de 1914 a été en partie récupérée sur les reins des voûtes.
250.000 kilos de plomb ont pu être transformés en lingots. Ils retourneront en place sur la nouvelle charpente en ciment après avoir été ramenés en feuilles de 0,003 à 0,004 d'épaisseur.


 
Sources : DENEUX (Henri), La Cathédrale de Reims, Bulletin mensuel de l’Association Provinciale des Architectes Français, juin 1924, p 222 à 223.

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