Le Bêtisier de la
Cathédrale

LES RAMPES DE TERRE

Une curieuse tradition créée au 19e siècle voudrait nous faire croire qu'au cours du Moyen-Age, les matériaux nécessaires à la construction des grands édifices, pierres, bois, chaux etc... auraient été hissés avec des chariots circulant sur des plans inclinés. Un complément à cette légende nous montre ces grands bâtiments remplis de terre et de sable permettant aux ouvriers de travailler à niveau.

Cette croyance concerne non seulement la Cathédrale de REIMS mais aussi toutes les grandes réalisations médiévales. Elle proviendrait de l'observation que les murs des cathédrales ne conservent pas de traces d'échafaudages.

En réponse à ces propos, il suffit d'observer que les plans inclinés nécessaires pour arriver seulement à la hauteur des voûtes d'une Cathédrale, soit 40 mètres (sans parler donc du toit, des tours etc...) auraient dû s'étirer sur au moins 400 mètres en longueur, sur 100 en largeur, pour une pente déjà pénible de 10 %, et il aurait fallu démolir des quartiers entiers des villes pour les installer. De plus, dans de nombreux cas, les rampes seraient sorties à l'extérieur des murailles urbaines.

Pour REIMS en particulier, on peut se demander comment se seraient alors déroulés les sacres de LOUIS VIII en 1223 et de LOUIS IX, en 1226, dans la Cathédrale en construction.

De plus l'examen des illustrations des manuscrits d'époque permet de constater qu'on n'y voit nulle part de ces plans inclinés, et qu'au contraire les échelles, échafaudages et machines élévatrices de toutes sortes y foisonnent. Voir Carnets de VILLARD DE HONNECOURT etc... Certaines de ces machines élévatrices existent encore. Quant à l'absence de traces d'échafaudages, il y a lieu de rappeler que l'art gothique aboutit à la quasi disparition des murs, les poussées s'exerçant uniquement sur les piliers et les contreforts. Il est donc facile d'installer des échafaufages de toutes tailles au travers des ouvertures des fenêtres.

On ne peut donc que recommander la lecture d'ouvrages intelligents sur cette affaire : GIMPEL, ICHER et autres.


LES EAUX SOUTERRAINES

Il y aurait sous la Cathédrale de REIMS un lac souterrain ou une rivière souterraine, avec espace libre, permettant de circuler en barque. Personne ne peut dire qu'il a effectué ce parcours mais tout le monde connaît "quelqu'un qui l'a fait".

Cette légende est ancienne et a été exploitée par les sapeurs-pompiers de REIMS il y a quelques décennies, un premier avril, époque où la brigade venait de percevoir un Zodiac flambant neuf, qui aurait été testé sur le lac en question.

On constate une confusion dans beaucoup d'esprits au sujet des eaux souterraines. Pour beaucoup, l'évocation d'une nappe d'eaux suggère l'idée de rivière circulant dans une galerie, alors qu'il ne s'agit généralement que de diffusion d'eau dans une couche géologique perméable, sable ou craie. S'il est exact qu'il y a de l'eau sous la Cathédrale, il s'agit de la nappe phréatique qui s'étend sous la totalité de la ville de REIMS et les environs, nappe qui a été exploitée pendant des siècles, et qui l'est encore, par d'innombrables puits. Roche de diffusion : craie fracturée perméable.

Il y a effectivement trois puits sous la Cathérale, l'un sous le transept nord, l'autre sous la nef, mais pas au milieu, vers le baptistère paléochrétien, le troisième vers la tour sud. En particulier, et pour contrebattre une idée très répandue chez les occultistes, il n'y a pas de puits sous le choeur, au niveau du maître-autel.

Il y a aussi sous la Cathédrale les restes des thermes gallo-romains, mais ces installations en ruine sont au dessus du niveau de la nappe aquifère..

Il faut ici rappeler que la Cathédrale de REIMS est un des seuls grands édifices religieux, sinon le seul en France, à avoir été étudié archéologiquement de manière à peu près complète, depuis DENEUX, et que c'est donc le seul bâtiment de ce genre sur le passé duquel on ne peut échafauder de théories fantaisistes comme à CHARTRES ou AMIENS.


LES CATHEDRALES MARIALES

Plusieurs légendes circulent à propos des Cathédrales mariales, le plus fréquemment, ces Cathédrales seraient disposées géographiquement les unes par rapport aux autres suivant des dessins précis, par exemple suivant le schéma des étoiles de la constellation de la Vierge. Partant du soi-disant constat que les Cathédrales de France seraient presque exclusivement dédiées à la Vierge Marie, d'autres théories présentent des développements très fantaisistes sur la symbolique des bâtiments. Ou encore les  cathédrales mariales se superposeraient à des sanctuaires gaulois etc...

Il faut ici rappeler quelques notions de base sur les Cathédrales. Une Cathédrale est l'église où se trouve le siège (dans les différents sens du mot) de l'Evêque. Il y a donc une petite centaine de Cathédrales en France (exactement 93), plus celles qui ont gardé leur titre après les regroupements d'Evêchés, surtout au moment du Concordat, soit un total d'environ 200. Sur ces 200 Cathédrales, seulement un tiers d'entre elles sont dédiées à la VIERGE MARIE, les autres principalement à St ETIENNE et à St PIERRE (10 % chaque) et le reste se dispersant sur une foule de saints.

Un tiers des cas, ce n'est pas assez pour échafauder des hypothèses sur la symbolique de l'architecture des Cathédrales en général,

Il y en a toutefois assez, une soixantaine, pour que leur dispersion géographique sur le terrain puisse prêter à n'importe quelle reconstitution d'images fictives, qu'il s'agisse du schéma d'une constellation, d'une croix, de la lettre M ou du chapeau de Napoléon. En effet, il suffit que les auteurs de ces reconstitutions sélectionnent les sites qui leur conviennent, en laissant de côté, évidemment, ceux qui ne rentrent pas dans leur projet. Ce bricolage est encore plus facile si on ajoute à ces Cathédrales les grands sanctuaires dédiés à la Vierge Marie, comme dans la région LIESSE ou L'EPINE.

On retrouvera exactement le même genre de tricherie à propos des figures soi-disant dessinées sur le terrrain par certains monastères (procédé utilisé par Maurice LEBLANC, dans un de ses romans sur ARSENE LUPIN).

On trouve aussi, dans des romans à "ambiance", genre VINCENOT,  l'affirmation qu'il y a un sanctuaire gaulois sous chaque Cathédrale mariale. Mais :

Il s'agit donc là d'affirmations totalement gratuites, généralisation abusive du constat fait ici et là que certaines églises ont effectivement succédé à des lieux de culte gallo-romains. C'est par exemple le cas de l'église Sainte LIBAIRE à GRAND. Mais les cas bien établis restent actuellement très rares.

LA SYMBOLIQUE DES NOMBRES

Les traditions juives et chrétiennes retiennent que certains nombres sont porteurs de symboles : par exemple, l'unité est associée au Dieu Unique, le chiffre 3 à la Trinité, le 7 est le nombre des jours de la création et de la semaine, et peut ainsi rappeler l'Ancien Testament. Par contre, le 8 est attaché au Christ, ressuscité le lendemain du 7° jour, donc le 8° etc...

Les bâtiments chrétiens anciens peuvent ainsi refléter ces traditions dans leurs détails architecturaux : nombre de piliers ou de travées de nef, nombre de côtés de structures polygonales etc...

Mais ce système a des limites et connaît un certain nombre d'approximations pour ne pas dire de tricheries. Par exemple, si le chiffre 8 se rapporte au Christ, faut-il voir dans toutes les structures octogonales, par exemple les bases des piliers de la Cathédrale, une allusion au Christ ? Il s'agit peut-être aussi bien d'une commodité technique à laquelle on a juxtaposé une symbolique après coup. Quelle était l'intention des constructeurs ? On manque de témoignages contemporains des réalisations en cause. Il faut aussi rappeler que l'octogone n'était pas exceptionnel dans les constructions romaines pré-chrétiennes (thermes, mausolées etc...). On pourrait faire des remarques analogues sur les autres nombres cités : 7, 12 etc...

Que dire des petits à-peu-près qui permettent de charger d'une symbolique indue des détails architecturaux comme le nombre des piliers d'une nef, pour lequel on prend on considération si cela arrange le symboliste de service, tantôt seulement les piliers libres, tantôt aussi les piliers engagés dans les murs d'extrémités.

Une autre source d'erreurs est liée à l'évolution durant le second millénaire de notre système de numération. Ce système est actuellement le système décimal avec chiffres indo-arabes et numération de position. En pratique, on ne se sert que de dix symboles numériques, de 0 à 9 pour exprimer tous les nombres, et on multiplie ces symboles par 1,10, 100 etc... en fonction de leur position, multiplication devenue inconsciente avec l'habitude.

Auparavant, on utilisait des lettres à signification numérale, dans le monde romain, "chiffres romains" bien connus : I, V, X etc.. aussi bien que dans les cultures juives et grecques où on se servait des lettres de l'alphabet courant, dotées des valeurs de 1 à 10 puis par dizaines de 20 à 100 et ensuite par centaines, la valeur globale se déterminant par addition des composants

Mais le système numérique décimal ne s'est vraiment généralisé en Occident que très tardivement. Après une apparition sans lendemain à l'époque de GERBERT, à la fin du 10e siècle, il est réapparu en Italie au 13e siècle, puis s'est diffusé très lentement en remplaçant la numération romaine. On ne peut donc tirer une symbolique du fait que certaines dimensions de bâtiments religieux anciens, exprimées à la moderne, donnent des chiffres curieux comme 111 (trois fois le chiffre 1, rappel supposé de la Trinité) alors que pour les bâtisseurs, ces nombres s'écrivaient de manière totalement différente (CXI pour cet exemple).


LE NOMBRE D'OR

De nombreux observateurs de l'architecture médiévale ont constaté l'utilisation fréquente d'un rapport de dimensions entre hauteur et largeur des bâtiments.

Ce rapport est d'environ 1,62, et a été baptisé le "nombre d'or".

L'utilisation de ce rapport permet de construire facilement des bâtiments bien équilibrés et agréables à l'oeil. Il s'agit d'un procédé technique très courant aux 12° et 13° siècles. On utilise encore de nos jours cette même relation ou une voisine dans des domaines artistiques tels que la photo ou la peinture.

Le problème est que toute une littérature s'est développée autour de cette affaire, invoquant des traditions ésotériques, entourant ce qui n'est finalement qu'une recette professionnelle assez simple, de toute une aura de mystère, faisant remonter le procédé à l'Egypte ancienne et Salomon via les Templiers. Il y a bien d'autres procédés et trucs techniques qui remontent eux aussi à des millénaires, par exemple les techniques liées à l'agriculture, greffe, sélection, etc... sans soulever autant d'intérêt.

Autre problème à signaler : voulant apporter le maximum d'effet à leurs conclusions, certains partisans inconditionnels du nombre d'or utilisent des prises de mesures appropriées, se servant, suivant le cas, de tel ou tel détail architectural, par exemple arrêtant la hauteur d'un pilier au bas des chapiteaux, ou en haut, en fonction du résultat chiffré qui va sortir. C'est alors de la tricherie pure et simple. Et ce n'est encore pas assez. Comme, malgré ces contorsions, on n'arrive quand même pas toujours au résultat attendu, un autre rapport a été inventé, le "nombre sublime".


L' ORIENTATION DE LA CATHEDRALE

Il circule sur la Cathédrale de REIMS, comme sur beaucoup d'autres et même les églises ordinaires toutes sortes d'indications prétendues symboliques sur l'orientation générale du bâtiment. Tantôt, il s'agit de la direction du soleil levant du 15 août, tantôt de la direction de JERUSALEM, ou encore du MONT-SAINT-MICHEL etc...

Un simple coup d'oeil sur une carte suffit à démonter la plupart de ces visions. L'axe de la Cathédrale de REIMS fait un angle de 31°25' avec la ligne Est-Ouest, le choeur étant dirigé en gros vers l'Est-Nord-Est. Dès lors, si on prolonge cet axe avec une règle on trace une ligne allant de la Rhénanie à la Vendée, ligne qui ne traverse ni même n'approche aucune ville significative (TREVES ou COLOGNE, ou LIEGE d'un côté, PARIS ou CHARTRES de l'autre). Et JERUSALEM ou ROME encore moins.

En théorie, la symbolique d'une église chrétienne s'appuie sur l'axe astronomique Est-Ouest. L'Est est le rappel du soleil levant, image du Christ ressuscité. C'est la direction de la Vie nouvelle. Par opposition, l'Ouest est la Mort, le Mal, le Péché. Ces orientations sont particulièrement évidentes dans les baptistères anciens.

Mais en pratique, l'orientation d'une église dépend essentiellement des conditions de sa construction. Si, comme c'est le cas à REIMS, les Evêques de l'époque ont utilisé des bâtiments gallo-romains préexistants, il est évident que l'orientation actuelle ne peut que suivre un antécédent pré-chrétien, et il est alors vain de chercher une explication liée à une lirturgie chrétienne. Par contre, si les constructions ont été édifiées sur terrain vide, les vraies intentions des bâtisseurs ont pu être réalisées et donc sont susceptibles d'être actuellement comprises.

On constate ainsi que les petites églises romanes construites dans les environs de REIMS aux 11e et 12e siècles sont, dans l'ensemble, mieux installées que les plus anciennes, l'orientation y est dans de nombreux cas à peu près exactement sur la ligne idéale Est-Ouest. Mais on constate quand même très souvent un flottement lié probablement à des déterminations astronomiques sommaires ou à des problèmes très concrets d'emprise foncière rendant impossible une implantation correcte.

On est ainsi amené à conclure que l'écart entre l'axe d'une église et la ligne Est-Ouest n'a aucune signification symbolique particulière. Il ne peut que renseigner sur les conditions pratiques dans lesquelles l'édifice a été construit.

La symbolisation des églises et de la liturgie qui s'y déroule est donc assez souvent approximative : l'orientation d'une église consiste à placer la porte d'entrée au bout qui se trouve le plus à l'ouest, et le choeur vers l'extrémité inverse, même s'il s'agit en réalité du nord-est ou de l'est-sud-est. Lorsque, rarement, cette disposition est inversée (choeur vers l'ouest), on dit que l'église est "occidentée", mais les raisons de cette disposition nous échappent généralement.


LE BOULET DE CANON

Une croyance très répandue à REIMS concerne la sphère métallique placée sous les pieds de la Vierge MARIE, dans la scène du COURONNEMENT DE LA VIERGE qui se trouve au dessus de la porte centrale de la façade Ouest.

La rumeur publique prétend que cette sphère est un boulet de canon logé là par miracle sous les pieds de la Vierge. Les mieux renseignés précisent même qu'il s'agit d'un boulet tiré par les artilleurs russes pendant les combats du 13 mars 1814 entre l'armée napoléonienne et les troupes coalisées, épisode militaire assez peu connu de ce qu'on a appelé la "bataille de France" à la fin de l'Empire.

Si on prend la peine d'examiner la sphère métallique en question, au Palis du Tau, car la scène du couronnement de la Vierge actuellement sur la façade n'est qu'une copie, on constate qu'elle est toute cabossée et visiblement creuse. De plus, elle est d'un diamètre bien trop considérable pour les canons des guerres de l'Empire. Enfin, on peut apprendre facilement qu'elle est en plomb, ce qui est inhabituel pour les boulets.

Un coup d'oeil sur un ouvrage quelconque traitant un peu en détail de l'histoire de REIMS, par exemple le BOUSSINESQ-LAURENT, nous indique en outre que les Russes et autres coalisés se trouvaient lors de cette bataille dans la ville de REIMS, face aux troupes napoléoniennes attaquant par TINQUEUX. Il aurait donc fallu que la bombarde russe tire à l'envers.

En fait, il ne peut s'agir que de la représentation de la Lune. En effet, dans la même scène, au dessus des deux personnages principaux, on voit le globe solaire dardant ses rayons, globe en bronze jadis doré, bien patiné et vert foncé actuellement. On a donc une référence évidente au texte de l'Apocalypse qui, au début de son chapitre 12 nous dit : "Un signe grandiose apparut au ciel : une Femme. Le soleil l'enveloppe, la lune est sous ses pieds, et douze étoiles couronnent sa tête.". Tous ces éléments : lune, soleil, couronne d'étoiles, figurent dans le tableau qui surmonte la porte centrale. Ce texte de l'Apocalypse sert de lecture depuis des siècles dans la liturgie de la fête de l'Assomption le 15 août. Une autre très belle image de cette Femme de l'Apocalypse se trouve à l'entrée de la chapelle de Saint Lié, près de Ville-Dommange, dans les environs de REIMS.


ERREURS DANS LES DESSINS

La construction de la Cathédrale actuelle a commencé en 1211. Le gros du bâtiment semble avoir été terminé vers 1280, sans qu'on puisse préciser vraiment une date, mais de nombreux détails de structures restaient à finir. Par exemple, les décors des pignons nord (Annonciation) et sud (Assomption) du transept n'ont été exécutés que vers 1500, les tours de la façade n'ont été commencées qu'après 1400, pour n'être terminées que vers 1450, la tour sud après la tour nord.

Pratiquement aucun dessinateur moderne ne tient compte de ces détails historiques, et on peut dire que pour cette seule raison de l'inachèvement des tours, tous les dessins et tableaux représentant le sacre de CHARLES VII à REIMS en 1429, sont faux. Dommage pour JEANNE D'ARC.

Autre détail générateur d'anachronismes : le linteau de la grande porte d'entrée Ouest était à l'origine sculpté de scènes, probablement de la vie de la Vierge, ainsi qu'en témoigne le dessin du 17e siècle de NICOLAS DE SON. Les portes latérales possèdent encore ce genre de sculptures (conversion de Saint PAUL) ainsi que le linteau intérieur de la grande porte (scènes relatives à l'exécution de Saint JEAN-BAPTISTE).

Mais le linteau extérieur a été tellement dégradé par des vandales pendant la Révolution qu'il a fallu le changer et un nouveau linteau a été mis en place au début du 19e siècle, portant seulement l'inscription qu'on peut encore lire maintenant malgré les dégâts de la première guerre mondiale : DEO OPTIMO MAXIMO etc...

Les dessinateurs du 19e et du 20e siècles reproduisent ce linteau moderne dans leurs illustrations relatives à des scènes médiévales, en particulier pour le sacre de CHARLES VII qui n'a vraiment pas de chance.

Une autre source de confusion provient d'un dessin de VIOLLET-LE-DUC représentant la "Cathédrale Idéale". Ce dessin est souvent présenté comme celui de la Cathédrale de REIMS terminée avec ses flèches. En réalité, un examen, même sommaire du dessin, montre qu'il ne s'agit pas de cet édifice, même si de très nombreux détails et l'allure générale l'évoquent.

Au début du 19e siècle, POVILLON-PIERARD a édité des dessins prétendant représenter les constructions précédant la Cathédrale actuelle. On ne sait s'il a copié des documents antérieurs ou s'il a totalement inventé son tracé, le fait est que ces dessins ne correspondent à rien de concret ainsi que l'ont montré les recherches effectuées depuis trois quarts de siècle.


LES RELIQUES DE SAINT ALBERT

Une histoire curieuse peut être racontée à propos d'une erreur relative à l'identification d'une tombe.

Fin 1192, donc peu de temps avant l'incendie de 1210, l'Evêque de LIEGE, ALBERT, se réfugie à REIMS pour se mettre à l'abri de la colère de l'Empereur d'Allemagne qui avait vu d'un très mauvais oeil son élection au siège épiscopal de LIEGE.

Pour faire leur cour à l'Empereur, trois nobles Allemands décident d'aller assassiner ALBERT à REIMS, ce qu'ils font, en novembre 1192, d'une manière épouvantable de cruauté, assénant 28 coups d'épée au malheureux Evêque, et cela devant une quantité de témoins. Le corps, entouré d'une vénération populaire immédiate, est inhumé dans la Cathédrale, à l'entrée du choeur.

Les siècles passent. Au début du 17e le clergé de LIEGE demande au Chapitre de la Cathédrale de restituer les ossements devenus reliques du saint Evêque. Ce que font les Rémois de bonne grâce, mais depuis l'inhumation, plus de 400 ans ont passé, une nouvelle Cathédrale a été construite et un nouveau jubé a été installé, si bien que les chanoines se trompent de quelques mètres et exhument, on le saura plus tard, un autre personnage, enterré à proximité de Saint ALBERT. Personne ne s'en aperçoit ni ne note que l'anneau épiscopal et le calice accompagnant le corps sont furieusement archaïques. Il y a des traces de coups d'épée sur le crâne, cela suffit.

Trois cents ans s'écoulent encore, et au travers des énormes travaux de restauration de la Cathédrale, on exhume les Archevêques enterrés à l'entrée du choeur. C'est alors que l'on découvre les restes d'un Evêque portant de nombreuses traces de coups, en particulier à la tête, et grâce à Louis DEMAISON, on identifie le corps de Saint ALBERT. L'anneau épiscopal et le calice sont bien de la fin du 12e siècle. Gros émoi. Que faire vis-à-vis des Liégeois ? Mais cela s'arrange en douceur, chacun retrouve son bien et le défunt rapatrié à REIMS est identifié comme étant ODALRIC, Archevêque de 966 à 969. Et finalement l'histoire de REIMS y gagne un détail, car nulle part il n'était fait mention dans les chroniques qu'ODALRIC était décédé de blessures à la tête.

© 2000 M. TERRISSE



Auteur : M. Terrisse


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