Victor Hugo(Besançon, 26 février 1802 - Paris, 22 mai 1885) |
Victor Hugo est né le 26 février 1802, à Besançon. Il est le dernier fils dun général dEmpire, le comte Léopold Hugo. Sa mère, née Sophie Trébuchet, élève seule ses trois enfants à Paris ; son mari séloignant au gré de ses obligations militaires, en Corse puis à lîle dElbe en 1803. Victor et ses frères passent leur enfance à lire et à se cultiver grâce aux bons soins maternels, notamment au parc des Feuillantines près duquel la famille Hugo sest installée au mois de mai 1809. Celle-ci doit cependant quitter la France et suivre en Italie en 1808 le comte Léopold Hugo, nommé gouverneur d'Avellino par le roi Joseph Bonaparte, puis en Espagne en 1811.
Avec la chute de lEmpire, Léopold Hugo est de retour à Paris. Victor et son frère Eugène sont alors retirés à leur mère, séparée de fait depuis quelques années davec son mari, et placés à la pension Cordier. Selon les vux paternels, ils se destinent à intégrer lÉcole Polytechnique. En 1816, Victor entre ainsi au Lycée Louis le Grand, délaissant parfois ses études pour rédiger des vers. Il obtient en 1818 une distinction en sciences physiques au Concours général. La même année, une procédure de divorce prononce enfin la séparation de corps et de biens des époux Hugo.
Encouragé par sa mère chez laquelle il peut enfin résider, Victor sadonne alors aux lettres avec lambition de réussir. "Je serai Chateaubriand ou rien", écrit-il à lâge de quatorze ans sur un cahier décolier. En 1817, il reçoit les encouragements de lAcadémie Française, qui a remarqué lun de ses poèmes. En 1819, le Lys dor lui est décerné pour la rédaction dune ode dinspiration royaliste : le jeune homme milite pour le rétablissement de la statue dHenri IV... Ce prix est la plus haute récompense décernée par lAcadémie des Jeux floraux de Toulouse.
Au mois de juin 1822, Victor Hugo publie son premier volume intitulé Odes et Poésies diverses. Cette uvre le fait remarquer des cercles royalistes. Louis XVIII lui attribue une pension de mille francs, obtenue à la demande de la duchesse de Berry. Les années qui suivent sont très prolifiques pour lécrivain. Les recueils de poèmes, (Nouvelles Odes en 1824, Ballades en 1826) ainsi que les romans, (Han dIslande en 1823 et Bug Jargal en 1826) se succèdent. Charles X, le nouveau souverain, le fait chevalier de la Légion dhonneur en 1825, alors qu'il n'est âgé que de vingt-trois ans. La même année, l'écrivain pensionné et membre de la Société royale des bonnes lettres, assiste d'ailleurs au sacre du roi, qui a lieu le 29 mai en la cathédrale de Reims. Une ode rédigée pour loccasion par le poète, chantre de lalliance du trône et de lautel, lui vaut un service de table en Sèvres ainsi quune entrevue avec le nouveau monarque
Après le décès de sa mère hostile au projet de son fils, Hugo se marie le 12 octobre 1822 à Adèle Foucher, une amie denfance dont il sest épris. Lécrivain est bientôt le père de quatre enfants. Se consacrant à son travail dhommes de Lettres, il se détourne peu à peu de ses obligations familiales et conjugales, séloignant de sa femme. Celle-ci se lie alors à son ami Charles Augustin Sainte-Beuve, qui devient davantage quun quun consolateur amical auprès de la jeune épouse, à partir de 1830. Quelques années plus tard, en 1833, l'écrivain fait la connaissance de Juliette Drouet, une comédienne du Théâtre de la Porte Saint-Martin quil ne quittera plus.
"Poète du parti ultra" suivant le mot de Stendhal, ses convictions politiques évoluent au cours de ces années. Dès 1824, il fréquente le salon de Charles Nodier, à lArsenal où celui-ci est bibliothécaire, et se rapproche de lopposition libérale. La mort de son père en 1828 réveille également son intérêt pour le passé napoléonien dont il découvre la grandeur. L'écrivain se prononcera dailleurs en faveur du retour en France de Louis-Napoléon Bonaparte, en dautres temps, en 1847. Au mois de février 1827, le poète compose son ode A la Colonne de la place Vendôme, un monument symbole de la gloire de lEmpereur des Français, fondu dans le bronze des canons pris aux armées prussiennes en 1806. Le 13 août 1829, Charles X fait interdire la représentation de sa pièce de théâtre Marion Delorme pour atteinte à la majesté royale. Victor Hugo refuse loffre dune pension royale de quatre mille francs, qui est censée le dédommager, et rompt alors avec le régime en place.
Son uvre littéraire évolue également. Le drame de Cromwell en 1827 puis le recueil des Orientales au mois de janvier 1829 et leurs retentissantes préfaces en dessinent la nouvelle orientation. Lécrivain réclame davantage de liberté dans lart et dans la création. Ceci est le prétexte de la bataille littéraire qui accueille la représentation du drame Hernani, dont la première représentation a lieu le 25 février 1830 au Théâtre-Français. Victor Hugo se présente alors comme le chef de file de la jeune génération romantique en animant le Cénacle, un cercle qui se réunit dans son appartement de la rue Notre Dame des Champs où se rencontrent les écrivains et les artistes de la jeune génération romantique. Parmi ceux-ci : Alfred de Vigny, Alfred de Musset, Gérard de Nerval, Eugène Delacroix Le 23 novembre 1832, la censure royale s'exerce de nouveau à propos de sa nouvelle pièce de théâtre, Le Roi s'amuse, représentée la veille sur la scène du Théâtre-Français.
Hugo est désormais un auteur à succès et sillustre avec les poèmes publiés dans Les Feuilles dautomne en novembre 1831, Les Chants du crépuscule en 1835, Les Voix intérieures au mois de juin 1837 ainsi que dans Les Rayons et les Ombres en 1840. Ces recueils d'inspiration lyrique lui permettent de rivaliser auprès du public avec Alphonse de Lamartine, tandis que les représentations au théâtre de ses drames comme Lucrèce Borgia, dont la première a lieu le 2 février 1833 à la Porte Saint-Martin, ou Ruy Blas, en 1838 et avec Frédérick Lemaître dans le rôle titre, lui assurent de confortables revenus. Victor Hugo montre également ses préoccupations humanitaires dans Le Dernier Jour dun condamné au mois de février 1829, puis Claude Gueux en juillet 1834, où il se fait le défenseur de labolition de la peine de mort. Une voix puissante et inspirée, mais trop isolée dans le siècle. Un nouveau roman, Notre-Dame de Paris, publié au mois de mars 1831, connaît également un grand succès dédition. Ce drame passionnel qui se noue autour de la personne d'Esméralda, cette redécouverte dun passé médiéval mythifié et placé en toile de fond en font lune des uvres emblématiques du mouvement romantique. Le 7 janvier 1841, Hugo est enfin élu à lAcadémie Française, après quatre échecs retentissants. Cest pour l'écrivain la consécration de sa gloire littéraire. L'arriviste est arrivé.
A cette époque, Victor Hugo entreprend également quelques voyages en compagnie de Juliette Drouet. Les deux amants visitent ensemble la Bretagne et la Normandie en 1836, puis la Belgique en 1837, lAlsace et la Provence en 1839 et enfin les bords du Rhin lannée suivante. En 1842, l'écrivain publie à cette occasion un recueil de texte intitulé Le Rhin, des impressions de voyage étoffées de quelques réflexions de circonstances. Laissant en effet de côté les polémiques qui opposent les milieux littéraires français et allemands, ce texte se conçoit comme un véritable programme de politique étrangère pour la France de la Monarchie de Juillet. Victor Hugo est ainsi favorable à l'unité allemande, celle-ci devant selon les vues de l'écrivain se réaliser au sein d'une Europe fédérale dont l'artère serait le Rhin, un axe franco-allemand.
Grâce à ses droits dauteur, Hugo vit désormais avec de confortables revenus. Sa nouvelle demeure, située au n°6 de la Place royale (actuelle Place des Vosges) où il sest installé au mois d'octobre 1832, est un lieu chic et mondain. Négociant habilement la publication de ses uvres complètes, il vit dans laisance. A la différence de François-René de Chateaubriand, Hugo néprouve aucun regret pour le régime défunt, celui de la Restauration. Répondant à une commande du nouveau gouvernement, na t-il pas rédigé un Hymne aux morts de juillet en1831, exécuté au Panthéon lors de la célébration des Trois Glorieuses ?
A partir de 1837, lécrivain est lhôte assidu du duc dOrléans, héritier du trône. Il se rapproche ainsi de la cour et se rallie bientôt à la Monarchie de Juillet. Le 13 avril 1845, le roi Louis-Philippe Ier le nomme Pair de France ce qui lui permet alors de siéger à la Chambre. Cependant, une nouvelle liaison avec une jeune femme mariée, Léonie dAunet, fait scandale. Les deux amants sont en effet surpris, le 5 juillet suivant, en flagrant délit dadultère. Le prestige du notable en est éclaboussé ; la jeune femme effectuera quant à elle deux mois de détention dans l'infamante prison de Saint-Lazare...
Lannée 1843 amène de profonds bouleversement dans son existence. Léchec de sa nouvelle pièce de théâtre, Les Burgraves, et surtout le décès accidentel de sa fille aînée Léopoldine, le 4 septembre, qui se noie avec son mari dans la Seine à Villequier, le touchent profondément. Au mois de novembre 1845, celui qui est un observateur attentif de la vie du peuple lors de ses promenades parisiennes entame un nouveau roman, qui devrait sintituler Les Misères. Victor Hugo noircit pendant cette période des centaines de feuilles de papier, autant de textes qui seront publiés par la suite, pendant ses années d'exil ainsi qu'au soir de sa vie.
Éloigné des problèmes politiques malgré ses fréquentations, la révolution de 1848 est pour l'écrivain une nouvelle commotion. Après avoir tenté de faire proclamer la régence de la duchesse dOrléans, haranguant les ouvriers parisiens en armes place de la Bastille, le 24 février, il se rallie rapidement à la Seconde République. Le 2 mars suivant, Victor Hugo prononce d'ailleurs un vibrant discours Place des Vosges à loccasion de la plantation dun arbre de la liberté. Il appelle alors à vives voix l'avènement de la "République universelle". Le 4 juin 1848, lors délection complémentaire, l'écrivain est désigné comme député de Paris à lAssemblée Constituante puis, le 13 mai 1849, à lAssemblée Nationale avec lappui des conservateurs. Au Palais-Bourbon, Hugo, prenant place sur les bancs de lAssemblée, sinstalle à droite.
Au cours des Journées de Juin pendant lesquelles le pouvoir réprime une insurrection populaire, à l'origine de laquelle se trouve la fermeture des Ateliers nationaux, le représentant du peuple, qui avait appelé à faire disparaître ces ateliers de charité quelques jours plus tôt, fait partie des soixante délégués chargés de tenir l'Assemblée au courant de la situation. Il préside également au mois d'août de la même année le Congrès de la paix qui se tient à Paris. Victor Hugo prononce à cet occasion un discours pacifiste qui connaît un grand retentissement en Europe. Fondateur dun journal dopinion, LÉvénement, avec ses deux fils et avec l'aide d'Émile de Girardin le 31 juillet 1848, il fait campagne pour lélection à la présidence de la République de Louis-Napoléon Bonaparte. Lécrivain est alors le fervent partisan dune démocratie libérale et sociale.
Cependant la vision quà Victor Hugo de sa mission dhomme politique a évolué au cours des derniers mois. Si le notable est toujours aussi effrayé par la violence utilisée par les agitateurs socialistes, par Adolphe Blanqui ou Armand Barbès notamment, il montre de plus en plus ses préoccupations humanitaires, sinquiétant de la condition du peuple. Victor Hugo rompt bientôt avec la majorité conservatrice en prononçant des discours dénonçant la misère, le 9 juillet 1849, puis critiquant la loi Falloux, le 15 janvier 1850, ainsi que le vote de restrictions à la pratique du suffrage universel, le 20 mai suivant. LÉvénement est d'ailleurs interdit au mois de septembre 1851.
Victor Hugo participe à lopposition républicaine au coup dÉtat du 2 décembre. Avec quelques autres députés républicains, il tente de former un comité de résistance, de soulever le peuple des faubourgs de la capitale après avoir lancé un appel à l'armée. En vain. Placé le 9 janvier 1852 sur la liste des proscrits et désormais interdit de séjour en France, il sest exilé à Bruxelles depuis le 11 décembre précédent, voyageant muni d'un passeport au nom de Jacques-Firmin Lanvin. Les deux décennies de règne de Napoléon III seront pour lécrivain et lhomme politique des années dopposition et déloignement. Cet exil devient volontaire, après son refus de lamnistie offerte par lEmpereur avec le décret du 16 août 1859.
Victor Hugo réside alors à proximité de la France, dans les îles Anglo-Normande de la Manche. Dans sa villa de Marine-Terrace à Jersey, il sinitie aux "tables parlantes" grâce à Delphine de Girardin, épouse de lhomme de presse ! Cependant, le 27 octobre 1855, l'écrivain est bientôt expulsé par les autorités après avoir protesté contre la visite de l'Empereur Napoléon III en Angleterre. Installé à Guernesey, il fait lacquisition du domaine de Hautville-house en 1856. Soufrant de la gorge et du froid, le proscrit se laisse pousser la barbe à partir de 1861. Dans les années qui suivent, sa famille s'éloigne de plus en plus fréquemment, afin notamment de s'occuper du devenir de ses contrats d'auteur. Sa femme, malade, le quitte bientôt et décède le 27 août 1868 à Bruxelles.
L'exilé rappelle régulièrement aux sujets de l'Empereur son existence. Membre du Comité de résistance au coup d'État, Victor Hugo fait entendre sa voix au moment de l'organisation d'un plébiscite le 21 novembre 1852 et destiné au "rétablissement de la dignité impériale dans la personne de Louis-Napoléon Bonaparte. Il rédige pour l'occasion une lettre de protestation. L'année suivante, le 21 novembre 1853, lécrivain fait également paraître Les Châtiments, un pamphlet dirigé contre Napoléon III quil a précédemment surnommé "Napoléon-le-Petit". Son uvre senrichit ensuite de romans qui constituent de véritables épopées humaines. Les Misérables publiés en 1862 sont un immense succès littéraire. Suivent Les Travailleurs de la mer en 1866 puis LHomme qui rit en 1869. En 1859, un recueil de poèmes, La Légende des siècles, qui vient après Les Contemplations, sinscrit dans cette veine dinspiration.
Après la défaite de Sedan et la proclamation de la République, le 4 septembre 1870, Victor Hugo est de retour à Paris. Symbole vivant de la résistance républicaine au Second Empire, l'écrivain est accueilli en héros par la foule des Parisiens à la gare du Nord. Son Appel aux Allemands, un texte maladroit et décalé, publié le 9 septembre suivant, nayant eu que peu deffets sur les troupes ennemis, celles-ci entament un siège en règle de la capitale. Hugo participe alors à leffort collectif de défense en distribuant les dividendes de ses droits dauteur.
Élu député de la gauche républicaine dans la capitale le 8 février 1871, en seconde position après Louis Blanc mais devant Léon Gambetta, il démissionne quelques semaines plus tard, le 8 mars, peu satisfait de la volonté de restauration monarchique que montre lAssemblée qui siège à Bordeaux. Victor Hugo napprouve ni la paix signée le 1er mars 1871 ni laccueil réservé à l'italien Giuseppe Garibaldi, celui-ci ayant pris part aux combats contre la Prusse aux côtés des Français. Se désolidarisant de l'aventure de la Commune, l'écrivain accueille néanmoins publiquement chez lui à Bruxelles, où il réside depuis le 22 mars, les communards réfugiés pendant la répression versaillaise.
Expulsé de Belgique, Victor Hugo se rend alors à Vianden au Luxembourg voisin. Il évoque bientôt les événements dramatiques de ces derniers mois dans LAnnée terrible, publiée en 1872. Le 7 janvier de la même année, l'écrivain est battu lors d'une élection législative partielle. Il lui faudra attendre quatre années et le 30 janvier 1876 pour retrouver sous la Troisième République un siège de parlementaire, en étant élu sénateur de Paris. Il milite alors au sein de l'assemblée pour l'amnistie des communards, celle-ci intervenant le 11 juillet 1880.
Entre temps, Hugo fait éditer de nouvelles uvres. 1874 voit la parution de son dernier roman, Quatre-vingt treize, dédié à la Révolution française et à la Convention. Des textes écrits le plus souvent pendant les années dexil à Guernesey paraissent également : LArt dêtre grand-père au mois de mai 1877, La Pitié suprême en 1879, Torquemada en 1882, LArchipel de la Manche au mois doctobre 1883
Cependant la santé du patriarche se détériore. Une congestion cérébrale qui le terrasse le 28 juin 1878 le laisse diminué. L'écrivain délaissera maintenant l'écriture, se contentant de mettre en forme et de publier ses productions inédites. En 1881, le nouveau régime "installé" fête son entrée dans sa quatre-vingtième année, ce qui donne lieu à une grande célébration populaire, le 27 février. L'avenue d'Eylau, dans la partie où il est installé depuis 1879, porte dorénavant son nom. Juliette Drouet décède le 11 mai 1883 ; Victor Hugo le 22 mai 1885 à 13 h 27 Mn, des suites dune congestion pulmonaire.
La Troisième République lui offre alors des funérailles
nationales. Celles-ci se déroulent le 1er juin suivant et sont loccasion
dun vaste rassemblement populaire autour dune des gloires nationales.
La veille de lévénement, un immense catafalque stationné
sous lArc-de-Triomphe permet à la foule de venir se recueillir
pendant la nuit auprès du grand homme. Le corbillard des pauvres, que
celui-ci a demandé dans son testament rédigé le 2 août
1883, sélance enfin, suivi par un interminable cortège composé
d'un ou de deux millions (?) d'admirateurs et de badauds. Il conduit le corps
de Victor Hugo au Panthéon.
Auteur : | Marc NADAUX |
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