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Il y a encore deux cent ans, se trouvait dans la cathédrale
de Reims, entre la seconde et la troisième travée, un vaste
dallage de pierres noires représentant, comme à Chartres
ou à Amiens, un Labyrinthe.
Construit en 1286 sa fonction première était de servir
de symbolique chemin de pèlerinage aux croyants qui le parcourraient
à genoux.
Mais le Labyrinthe de Reims avait une autre particularité bien
plus intéressante pour les historiens : il livrait les noms des
quatre premiers architectes de la cathédrale et c'est grâce
à lui qu'ils nous sont aujourd'hui connus. |
En effet, de nos jours, beaucoup de cathédrales en France sont "anonymes",
les noms de leurs concepteurs ont été perdus au cours du
temps. Alors qu'aux quatre coins du Labyrinthe de Reims se trouvaient quatre
personnages représentant les quatre architectes et des inscriptions
donnant leurs noms : dans l'ordre Jean d'Orbais qui fit les plans et éleva
le chevet, puis Jean Le Loup qui ouvrit les portails Nord, Gaucher De Reims
qui commença la façade Ouest et enfin Bernard De Soisson
à qui une rosace et les premières voûtes furent attribuées.
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Jean Le Loup qui fut maître d'oeuvre
de la cathédrale, l'espace de seize ans et qui commença les
portails (nord) |
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Jean d'Orbais, maître d'oeuvre de la cathédrale
qui commença le chevet |
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Gaucher De Reims qui fut maître d'oeuvre
l'espace de huit ans. Il débuta les voussures et les portails (de
la façade Ouest) |
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Bernard De Soisson qui fit cinq voûtes
et ouvrit la rosace ouest. Maître d'oeuvre l'espace de trente-cinq
ans. |
Tous étaient représentés avec un attribut de leur
profession : l'un tenait une équerre, un autre un compas, un troisième
une corde à nœuds servant à mesurer et le dernier dressait
l'index comme pour donner un ordre.
Au centre du Labyrinthe se trouvait un grand personnage que l'on a
coutume d'identifier comme Aubry de Humbert, l'archevêque rémois
qui décida en 1211 de reconstruire une nouvelle cathédrale
à la place de l'ancienne rasée par un incendie en 1210.
Enfin deux autres personnages, que nous n'avons pu identifiés
en raison de l'absence d'inscriptions lisibles, se situaient à l'entrée
du Labyrinthe. Peut-être étaient-il deux autres architectes
désormais voués à l'anonymat.
Certains historiens ont pensé que le Labyrinthe avait été
élevé, non seulement pour sa vocation de chemin de pèlerinage,
mais aussi à la gloire des architectes qui ont réussi à
dresser, au XIIIème siècle, cette colossale œuvre d'art qu'est
Notre Dame de Reims. Et ainsi ces historiens ont fait un parallèle
avec le Labyrinthe de Cnossos qui immortalisa lui aussi son créateur,
l'architecte Dédale.
Malheureusement si vous ne trouvez plus le Labyrinthe maintenant c'est
parce qu'il a été détruit en 1779 par les chanoines,
soi-disant dérangés par les enfants qui jouaient dedans durant
les offices.
Malgré sa disparition il reste la marque de ces géniaux
architectes qui ont bâti notre chère cathédrale et
il sert aujourd'hui de symbole aux monuments historiques français. |